D’étudiante en commerce extérieur à commissaire-priseur huissier de justice, Rosine Bogoré Zongo a gravi les échelons jusqu’à diriger la Chambre nationale des Huissiers de Justice du Burkina Faso pendant plusieurs années. Sa contribution à l’évolution de la profession d’huissier de justice au Burkina, fait d’elle une femme leader inspirante.
Née dans une famille où l’amour et l’éducation sont des valeurs fondamentales, Rosine Bogoré a grandi avec une discipline stricte inculquée par son père, soucieux de former des enfants responsables et intègres. « C’était pour nous former à être des femmes et des hommes responsables avec beaucoup d’amour et des valeurs d’intégrité, de respect, des valeurs de travail et de travail bien fait », explique Rosine.
Au sein de cette famille, parents et enfants sont complices. Une communication sans tabou et un contact sans protocole forment leur quotidien. Ces atouts assez rares ont conduit Rosine à avoir une relation fusionnelle avec son père. La petite Rosine voyait son père comme un baobab, indéracinable. Inséparables.
Une carrière bien remplie
Après sa maîtrise en droit à l’université de Ouagadougou, elle poursuit ses études de commerce extérieur en 3e cycle, à l’université Paris IV Renée Descartes, en France.
De retour au bercail, elle effectue un stage dans un domaine autre que le commerce extérieur. Rien n’aurait pu laisser croire qu’elle s’investirait dans ce secteur d’activité. « Quand je suis rentrée, un oncle qui était magistrat, a approché mes parents pour leur dire qu’il a une connaissance, qui a besoin d’un clerc d’huissier. J’ai dû arrêter mon stage. Arrivée dans cette étude, j’ai aimé ce que je faisais et j’ai dit à mes parents que je vais rester dans cette profession », indique-t-elle.
Impressionnée par cette expérience, Rosine Bogoré dépose ses valises dans la maison huissier de justice. Les parents étaient sceptiques, mais ont tenu tout de même, à l’accompagner dans son choix.
Une passion naissante qui la mènera au premier contact avec la profession d’huissier de justice en 1993. Ensuite, elle obtiendra la charge d’huissier en 1998 et elle débute sa carrière comme huissier de justice, commissaire-priseur. Un huissier de justice est un officier ministériel chargé de la rédaction et de la signification des actes, ou de procéder à des constats, l’exécution des décisions de justice et d’assurer le service des audiences. dans sa mission de commissaire-priseur, elle effectue la vente publique aux enchères de biens meubles.
Par la suite, elle parcourt le monde dans le but de renforcer ses compétences. Depuis 2008, Rosine Bogoré, préside aux destinées de la Chambre nationale des Huissiers de Justice du Burkina Faso jusqu’en juin 2024. Durant son mandat, elle œuvre avec le bureau à faire adopter la loi portant règlementation de la profession d’huissier et son décret d’application en 2022. Ce qui a permis à la Chambre pour la première fois dans l’histoire de la profession d’être reconnue légalement. La Chambre a pu adopter un règlement intérieur pour permettre une meilleure organisation de la profession.
En 2015, papa est arraché à l’affection des siens. Face à la triste nouvelle, le monde s’effondre autour d’elle. « Je ne me voyais pas vivre sans mon père même quand on sait, qu’il est appelé à partir, un jour. On ne l’intègre pas et c’était très très dur », souffle Rosine, dépitée. Pour celle qui n’avait pas l’habitude de rester loin de son père, le coup est dur.
Famille soudée et unie, maman et ses enfants se donnent la main pour affronter cette douloureuse épreuve.
« Le plus important, c’est de profiter du présent ».
Mère d’un enfant, Rosine Bogoré malgré ses multiples occupations, sait allier profession et famille. A l’en croire, il ne faut pas privilégier un, au détriment de l’autre. Il faut équilibrer les deux.
Cette leçon, Rosine l’a comprise très tôt. Pour y arriver, elle s’est donc, entourée de sa famille, en plus des gens solidaires et compréhensifs. « Cela permet de donner le meilleur de soi-même », dit-elle.
Satisfaite de son parcours, Rosine Bogoré estime avoir accompli pleinement sa mission. La Chambre nationale au Burkina n’avait pas de textes régissant la profession mais plutôt, l’ordonnance de 1992. Sous sa coupe, les membres de son bureau ont travaillé à ce que l’ordre soit officiellement reconnu, en 2017.
Être Huissier de justice dans un contexte de préjugés socioculturels peut dissuader et décourager. Sauf que dans le langage de Rosine, ce vocabulaire n’existe pas. Elle a choisi de bâtir sa carrière au prix de la persévérance, la rigueur au travail, le don de soi et le professionnalisme tout en respectant les règles d’éthique et de déontologie.
À courts termes, Rosine mise sur un temps de repos après toutes ces années de travail, à la tête de la Chambre. Puis, elle entend s’investir par la suite, pour contribuer à travailler au rayonnement de l’Union africaine des huissiers de justice qu’elle a contribué à créer et au sein de laquelle, elle occupe le poste de vice-présidente depuis 2017. « Je ne me suis pas vraiment projetée dans le long terme. Le plus important, c’est de profiter du présent », spécifie-t-elle.
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Des sentiments de reconnaissance
A toutes ces personnes qui ont eu recours à ses services, Rosine témoigne sa gratitude et saisit l’occasion pour soumettre une requête. « On reçoit tellement de gens et nous pensons que nous servons à quelque chose dans l’appareil judiciaire. A ceux qui n’ont pas trouvé satisfaction, je dis vraiment désolée. C’est peut-être pour une raison qui ne dépend pas forcément de notre volonté. Je pense aux justiciables qui n’ont pas de grands moyens. Si au niveau de l’État, quelque chose peut être faite pour dooter le fonds d’assistance judiciaire, de moyens plus consistants, cela pourrait davantage faciliter l’accès à la justice », rêve-t-elle.
Depuis que le Burkina traverse la crise sécuritaire et humanitaire, beaucoup de compatriotes ont perdu la vie et de nombreuses familles sont meurtries. Rosine Bogoré touchée par cette situation a une pensée pour toutes ces familles, félicite et encourage toutes les forces de défense et de sécurité pour le noble combat qu’elles mènent pour l’honneur de la patrie. Son vœu le plus cher, est que le pays des hommes intègres puisse sortir de cette situation, le plus tôt possible !
Françoise Tougry
Abdoulaye Ouédraogo
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