Le livre renferme des connaissances et des valeurs qu’on peut porter au monde. Loin d’être un simple ouvrage, il donne des opportunités de découvertes, éduque, encourage et inspire. Patricia Kakou Marceau M’Bahia épouse cette idéologie. De son nom d’artiste PKM LY, elle visite grâce à sa plume, le quotidien des femmes et les galvanise. Dans cet entretien, la conteuse, narratrice musicale, accompagnatrice dans les épreuves de la vie par la poésie, et initiatrice du concept « Défilé de mode en poésie », se laisse découvrir.
Qu’est-ce qui vous a motivée, à vous lancer dans l’écriture ?
Quand j’avais 10 ans, je suis allée à la bibliothèque de mes parents et je suis tombée sur une anthologie où j’ai découvert le sonnet de Félix Arvers d’autant plus qu’il disait, être tombé amoureux d’une femme et que cette dernière ne le saura jamais. Il disait qu’elle ne saurait pas qu’il y a murmures d’amour sous ses pas. Ça m’a plu et inspirée et j’ai fini par écrire mon premier poème dont le titre est « Mon délice ». Plus tard, je me suis mise à écrire de petites phrases, de petits poèmes, de petits mots et je n’arrêtais pas d’écrire. Donc, mes amies par exemple, qui s’étaient disputées venaient me demander d’écrire des textes pour elles et je le faisais. Exemple : quelqu’un venait me dire : Je suis amoureux d’une fille, j’écrivais un poème et j’écrivais tout et n’importe quoi (rires). Cette envie d’écrire pour les autres est restée.
Vous avez écrit un livre qui s’intitule « Pourquoi la lune et le soleil ne se parlent plus ?»
Par rapport à ce livre, quand j’étais petite, mon père et moi, on s’allongeait sur l’herbe et on regardait le ciel. Parfois dans les nuages, on avait l’impression de voir un cheval, un animal…
L’éclipse et la lune ne viennent jamais ensemble. Cela veut dire que pendant l’éclipse, la lune et le soleil se rencontrent mais, se séparent à nouveau. En d’autres mots, il s’est passé quelque chose entre ces deux éléments. Voilà pourquoi quand la lune apparaît, le soleil disparaît. Quand le soleil apparaît, la lune disparaît.
A l’intérieur de ce livre, à travers une histoire imagée, je montre comment un mensonge peut détruire des vies. La morale que je donne aux enfants est : l’honnêteté et la vérité sont la base de la confiance. C’est ainsi que j’ai eu l’idée d’écrire ce livre.
Vous avez choisi d’écrire « Cœur poétique » pour les enfants de 14 à 99 ans. Pourquoi avoir choisi cette tranche d’âge et non les tout-petits ?
« Cœur poétique » est une histoire de vie. C’est mon vécu mais, c’est aussi le vécu de mon entourage. Les enfants de moins 14 ans n’ont pas souvent vécu beaucoup de choses. Or, dans ce livre, il y a des thèmes très forts. Quand je fais mes dédicaces dans les écoles, par les témoignages d’enfants, je vois que certaines jeunes filles ont vécu des situations difficiles et c’est cet âge-là que je voulais toucher. Les enfants de 12 ans me demandent pourquoi c’est écrit 14 ans ? Ils disent qu’ils vont quand même l’acheter et le lire. Ils sont très curieux. Comme il fallait mettre un âge, j’ai mis 14 ans. Je me dis aussi qu’à 99 ans, on est toujours jeune.
Combien de livres, avez-vous à votre actif ?
Deux recueils de poésie dont « Cœur poétique I » paru aux éditions L’harmattan à Paris ; « Cœur poétique II » paru aux éditions Kampy à Abidjan ; « La lune et le soleil ne se parlent plus », un conte pour enfants paru aux éditions Barrow ; « Nature aime sa famille », un autre livre pour enfants paru aux éditions Kampy. Auparavant, j’avais titré le dernier « Le feu trahit ses frères ». Mais, j’ai vu que ce titre effrayait les enfants. Ils n’avaient pas le même engouement que « Nature aime sa famille » qui est plus doux. Quand j’ai changé, le titre, j’ai changé l’histoire. Les enfants ont beaucoup aimé cette version. Je me suis rendue compte qu’avec les enfants, il faut faire attention au titre. Ce mot trahir n’est pas passé.
Vous avez reçu un hommage au festival de la poésie africaine, à Rabat en 2023. Qu’est-ce qui a motivé les organisateurs à vous décerner cette distinction ?
J’ai eu cet hommage pour mon poème, « Mon père ». J’ai écrit ce poème au lendemain du décès de mon père. Ça parle de lui, et je dédie cet hommage à tous les papas du monde parce que je trouve qu’il y a des papas qui sont formidables, des papa d’amour qui, quand ils partent laissent une absence. Il est décédé en 2009. J’ai écrit le poème en 2010 et j’ai reçu la distinction en 2023.
Qu’est-ce qui intéresse les femmes quand on parle de livre ?
Les femmes aiment lire. Mais, ont-elles vraiment le temps de lire ? Parce qu’une femme dans le foyer s’occupe du ménage, des enfants, de la maison, va travailler et revient parfois, fatiguée. Le soir, il faut s’occuper du mari, l’écouter, écouter les enfants, écouter la servante, elle écoute tout le monde. Une femme, c’est formidable. D’après un monsieur, vous êtes faites pour ça. Vous pouvez tout encaisser.
A mon avis, les femmes aiment lire surtout les livres qui font voyager pour sortir du quotidien. Elles ont envie de lire et il faut plutôt offrir les livres aux femmes. Certaines n’ont peut-être même pas le temps d’aller en acheter, encore moins, de le feuilleter… Celles qui ont un peu de temps lisent. Mais, la plupart des femmes n’ont pas le temps parce qu’elles ont du travail. Le travail de maison-même, c’est du travail. Si on offrait les livres aux femmes, franchement, elles seraient heureuses et après, elles trouveront le temps de lire.
« J’encourage les femmes à ne pas se laisser faire, ne pas se laisser marcher sur les pieds ni se laisser emprisonner ».
Croyez-vous que les livres peuvent influencer la vie des femmes ?
Oui. J’achète des livres qui racontent des histoires vraies. J’adore. Il y a des livres qui me donnent des conseils, qui me boostent. Certains livres impactent la vie. Alors, chaque personne trouve le livre qui lui correspond. D’autres aiment les bandes dessinées où les histoires fantastiques parce qu’ils sont plongés dans le réel et ils veulent rêver un peu. Pendant que d’autres encore préfèrent les films policiers parce qu’ils aiment résoudre des énigmes.
Au travers d’un livre, on peut éduquer nos enfants. Parfois, il y a des livres qui donnent la confiance en soi et automatiquement, cela nous donne des mots et des idées pour mieux parler à nos enfants, nos cousins, les gens autour de nous. Vraiment, le livre, il est petit mais, il renferme tellement de valeurs, de qualités et de choses qu’on peut porter au monde.
Beaucoup de femmes sont des auteures et des écrivaines. Le nombre est-il synonyme d’impact ?
Non, je ne pense pas. Maintenant, avec les réseaux sociaux, l’informatique et autres, les gens ont accès un peu, à l’écriture. Ils écrivent ce qu’ils veulent et les vendent peu importe, s’il y a du n’importe quoi dedans. Dans ce cas, ils ne vont pas impacter les gens. Sont-ils vraiment écrivains ? Est-ce qu’ils écrivent pour sensibiliser, pour aider ? Le but doit être la passion. Lorsqu’on aime ce qu’on fait, lorsqu’on a envie de donner un message, on fait attention à ce qu’on écrit. Donc, on opte pour la qualité. Lorsqu’on voit que l’écriture n’est pas comme il faut, on demande des conseils pour que le rendu soit au moins, correct.
Un dernier mot!
J’encourage les femmes à ne pas se laisser faire, ne pas se laisser marcher sur les pieds ni se laisser emprisonner. Chacune d’entre nous peut écrire même si elle ne devient pas écrivain.
Elle peut prêter ses mots à quelqu’un qui va les écrire parce qu’on a tellement d’histoire et de vécus à partager que je me dis, il ne faut pas les garder pour nous. Chaque femme est une expérience pour la vie d’une autre.
Entretien réalisé par Françoise Tougry
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