Dans le cadre de la commémoration de la journée nationale de la sécurité routière, nous avons posé le regard sur les jeunes volontaires qui règlementent la circulation à Ouagadougou. Une équipe de Queen Mafa a passé une heure de temps au feu tricolore de la sortie Est de l’Université Pr Joseph Ki-Zerbo (UJKZ), auprès de Latifatou Rabo, Rachide Yamwenda et leurs collaborateurs, membres de l’Association de Faso One Village (AFOV).
Klaxons, bruits de moteurs, vrombissements, coups de sifflets. C’est l’ambiance qui prévaut dans la matinée de ce vendredi, 13 octobre 2023, au feu tricolore de la sortie Est de l’université Pr Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou (UJKZ), aux environs de 11 heures.
Casquettes sur la tête, habillés en tenues de travail, sifflets dans la bouche, ces trois filles et deux garçons ont le regard focalisé sur le feu tricolore et les usagers de la route. Tous des bénévoles, leur motivation vient du fait qu’ils ont envie de faciliter la circulation dans le but d’éviter les accidents.
Mais, malgré leur bonne volonté, ils peinent à faire circuler convenablement les citoyens burkinabés et à faire respecter les consignes.
Le feu étant rouge, Latifatou fait signe à une partie des usagers de s’arrêter. Au même moment, un élève tel un loup affamé force le passage, se fraie un chemin dans cette foule et continue tout naturellement sa route, tout serein.
Négligence, mépris et grossièreté animent majoritairement le quotidien de ces jeunes. « Ils sont nombreux, ceux qui ne nous considèrent pas. Nous essayons de sécuriser la circulation sous cet ardent soleil. Les gens brûlent le feu mais, on s’en sort avec l’aide de certains », a souligné Rachide Yamwenda.
Des propos soutenus par Latifatou Rabo, collaboratrice de Rachide, qui dans un premier temps avait refusé de se prononcer quand nous lui avons tendu le micro. Après des échanges rassurants, elle se confie enfin. « La population burkinabé doit accorder plus de respect aux membres de l’AFOV car leur cause est noble. Les gens nous insultent. Ils nous disent d’aller chercher du boulot car ceci n’est pas un boulot », a-t-elle déploré.
Une fois que le feu passe au rouge, ils saisissent également cette occasion d’arrêt pour approcher ces derniers et soumettre une doléance. « Nous demandons de l’aide. Votre contribution s’il vous plait » lancent-ils. Et des âmes sensibles réagissent. « Notre journée se passe bien avec l’aide des gens », a affirmé Rachide Yamwenda.
Ils se voient souvent obligés d’aider certaines personnes qui ont du mal à faire démarrer leurs engins lorsque le feu passe au vert en les poussant par l’arrière. En effet, juste après notre arrivée, une pareille scène s’est produite. L’un d’entre eux a aidé un homme à pousser sa voiture afin de libérer la voie.
Cependant, des difficultés ne manquent pas. Latifa Rabo nous confie qu’ils passent 11 heures de temps par jour pour règlementer la circulation. « Nous montons de 7h à 13 h. Nous prenons la pause et nous reprenons de 14h à 17h, chaque jour. Nous ne recevons pas de salaire par mois. Nous nous en sortons grâce à la contribution de certains usagers. Ce qui permet à chacun d’avoir au moins 1000f à la fin de la journée », explique-t-elle.
Les accidents de la route, monnaie courante à Ouagadougou
Selon Sayouba Nikièma, commerçant de fauteuils, dans une ville comme Ouagadougou où les accidents de la route sont devenus monnaie courante, l’initiative prise par l’AFOV de sécuriser la circulation est salutaire. « Vous verrez des enfants de rien du tout qui font des acrobaties avec les motos et ils ne se posent même pas de questions sur la densité de la circulation. Je me dis qu’ils n’ont pas été beaucoup sensibilisés sur ça et quand je regarde, c’est décevant », a-t-il lâché. Et il poursuit sur la dégradation de la qualité de leur prestation. « Ils faisaient un très bon boulot au début surtout quand on fait face aux situations de délestages. Mais, avec le temps, ils ont baissé la rigueur qui faisait leur particularité », a-t-il indiqué.
Pour lui, la présence des agents de l’AFOV au niveau du feu tricolore n’a pas de changement capital. « En temps normal, leur présence devrait amoindrir les accidents de la route. Mais, nous ne pouvons pas passer toute une journée sans constater un accident. Je me demande s’ils ont reçu des formations avant de venir commencer à travailler », s’est-il interrogé.
A l’endroit de tous, le message de Latifatou Rabo est interpellateur. « Je demande à tout un chacun de circuler à vitesse modéré. Certes, nous essayons d’éviter les accidents mais si on ne nous facilite pas la tâche, c’est compliqué », a-t-elle lancé.
Selon Sayouba Nikièma, l’Etat doit intégrer le code de la route dans le programme scolaire. Je ne parle pas de permis de conduire mais plutôt, du code de la route », a-t-il laissé entendre.
A l’en croire, tous n’ont pas les moyens de faire le permis de conduire mais, tous ont besoin d’emprunter la route et la maîtrise du code de la route serait bénéfique à tous. « J’insiste sur l’éducation parce que tous les enfants qui naissent aujourd’hui ont des fortes chances d’aller à l’école », a-t-il expliqué.
Abdoulaye Ouédraogo
Rachel Ouédraogo stagiaire