Etudiante en licence d’Allemand à l’UFR-LAC de l’université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou, Sadia Sagain Savadogo une jeune femme d’origine modeste, s’est vue obligée de mener une activité commerciale pour pouvoir survenir à ses besoins. Avec son enfant au dos, elle sillonne la capitale ouagalaise pour proposer ses marchandises. Zoom sur femme battante
Vêtue d’un t-shirt, d’un pagne, des sandales et un enfant de 23 mois au dos, Sadia Sagain Savadogo, l’étudiante aborde toutes les personnes qu’elle croise sur son chemin et leur propose des habits et autres accessoires.
Nous l’avons croisée, ce 28 juillet 2023, dans une station-service située à la zone du bois. Ses articles dans un grand sachet. Elle les déballe un à un afin d’offrir largement le choix à qui, serait intéressé.
Un début assez difficile
C’est en 2021 que Sagain se lance dans le commerce après trois années à étudier l’Allemand à l’université. Elle démarre son activité avec 50 000F CFA qu’elle obtient grâce au Fonds national pour l’Education et la Recherche (FONER). Une belle opportunité pour mener une activité génératrice de revenus.
Malheureusement un an plus tard, son business prend un coup pour cause de grossesse. La jeune dame doit alors faire une pause jusqu’en fin 2022. « J’avais stoppé à cause de l’enfant qui était vraiment très petit. Cette année, j’ai essayé de relancer mon activité avec mon FONER. Actuellement, je rends grâce à dieu, je suis en train de persévérer », se réjouit-elle.
Résidant non loin de l’église Saint Camille, Sagain Savadogo dispose d’une mobylette pour ses déplacements. Elle arpente les artères de la ville de Ouagadougou à la quête de son gagne-pain.
« Quand je vois un grin, je m’arrête pour présenter mes articles, ils paient et je continue ma route. Au niveau des stations, même chose », explique-t-elle. Sa recette journalière varie entre 10 000F et 20 000F.
Un commerce rentable, mais…
Dans la recherche de clientèle, la jeune femme ayant un bébé au dos est encouragée dans son commerce. Certains clients la félicitent d’avoir osé cette aventure.
« Ils disent que je suis un exemple à suivre. Que rares sont celles qui vont vraiment faire ce genre d’activités ! Que surtout avec l’enfant au dos, ce n’est pas facile ! Mais, qu’avec le temps, Dieu facilitera la tâche ! », souligne-t-elle, le sourire aux lèvres.
Sur le plan commercial, Sagain Savadogo affirme rencontrer des obstacles qui ne lui facilitent pas le travail. « Souvent, des gens à qui, je présente mes articles me regardent d’une manière bizarre. Ce n’est pas facile. Mais, je mets ça de côté puisque je vise un objectif », dit-elle avec un ton teinté d’espoir.
Malgré ces comportements désobligeants, elle ne cède pas au découragement car de bonnes volontés la soutiennent dans son élan. « Une femme par exemple avant-hier a garé son véhicule, ici. Elle m’a donnée beaucoup de conseils et de plus, elle a donné mille francs à mon enfant. Elle m’a dit de persévérer », clarifie-t-elle.
« Fais très attention à ton enfant ! Ne le laisse pas traverser la voie ! Prend bien soin de l’enfant et essaie de jongler un peu, un peu !», lui a recommandé cette dame qui dit la considérer comme sa fille.
Sur les traces de madame Bélemviré
Malgré son commerce, Sagain n’oublie pas ses études. Une fois sa licence en poche, Sagain Savadogo qui a le soutien de son conjoint compte mettre les bouchons doubles pour poursuivre parallèlement ses études jusqu’au doctorat. Elle tire sa passion pour l’allemand depuis le collège sainte Marie de Ouahigouya.
Très brillante dans cette matière, elle force l’admiration depuis le lycée. « J’avais de très bonnes notes. En 2018, j’ai eu 18/20 au Bac », confie-t-elle.
Mais, ce n’est pas la seule raison. « De surcroît, mon professeur d’allemand m’a fait aimer cette discipline. Madame Bélemviré dont j’ai oublié le prénom était vraiment excellente. Je la voyais comme un exemple », fait-elle savoir.
C’est donc pour emboîter ses pas qu’elle s’est orientée dans cette filière, une fois le Bac A en poche. Même si aujourd’hui, elle n’a plus de nouvelles de son professeur, madame Belemviré reste un modèle pour Sagain Savadogo et cette dernière espère pouvoir un jour, la rencontrer afin de lui traduire toute sa reconnaissance pour les valeurs inculquées.
Françoise Tougry