Dynamique et ambitieuse, Suraiya Toni est élève en classe de première à Enko Ouaga, passionnée de lecture. Cette passion l’a conduite à initier un projet de collecte de livre en vue de crer une bibliothèque bilingue gratuite . A moins d’une semaine de l’ouverture de ladite bibliothèque, Queen Mafa a pu la rencontrer. Dans cet entretien, elle dévoile la particularité de la bibliothèque ainsi que ses projets.
Qui est Suraiya ?
J’ai 15 ans et je suis en classe de 1re. J’aime souvent dire que je suis née dans les livres. Ma mère et mon père lisent beaucoup. Donc, j’ai grandi au milieu de grandes étagères avec énormément de livres. Je me souviens même de cette période où ma grande sœur me lisait des histoires avant que j’aille dormir parce que je ne savais pas lire. Toute chose qui m’a incitée à lire depuis toute petite.
Pourquoi avoir initié une collecte de livres pour l’ouverture d’une bibliothèque ?
Le programme scolaire dans lequel je suis nous incite à initier un projet personnel. De ce fait, j’ai décidé d’ouvrir une bibliothèque, de faire quelque chose qui me plaît et aussi servir ma communauté. En effet, j’ai remarqué que les gens n’aiment pas lire. Je me suis dite : « Est-ce que ce n’est pas un souci d’argent ? En analysant la situation, j’ai décidé de créer une bibliothèque gratuite, ouverte à tout le monde avec un cadre auquel les gens s’intéressent . Lire, c’est entrer dans un monde nouveau et c’est aussi l’opportunité d’apprendre d’autres cultures. C’est quelque chose qui est très importante pour moi parce que je veux travailler dans des relations internationales.
» Tu peux donner un livre et changer la vie d’une personne «
La bibliothèque s’appellera « Change ». Pourquoi ce nom ?
Ça vient d’un slogan. Ça veut dire que tu peux donner un livre et changer la vie d’une personne.
« Change » ne serait pas aussi de changer les mentalités ?
Oui. En Afrique et notre tranche d’âge généralement, on se dit que ce sont les « intellos » qui aiment lire des gros livres. Or, la lecture est ouverte à tous, c’est découvrir un monde magique. On doit changer les mentalités. Ce nom, c’est d’avoir un impact afin de toucher tout le monde.
Quels sont les soutiens dont tu bénéficies dans le cadre de ton projet ?
Un centre de langues a mis à ma disposition une petite salle. J’ai eu également du soutien au niveau de certaines institutions parce qu’il faut quelqu’un pour les impressions ( cartes, flyers…). J’ai aussi eu le soutien pour la charte graphique.
Comment se fait la collecte ? Quelle est ta stratégie pour la mobilisation ?
Nous misons beaucoup avec les réseaux sociaux en particulier Instagram. On fait beaucoup de stories, beaucoup de publications et on partage énormément. J’ai fait un shooting avec mes camarades. Quand la personne voit l’affiche avec de belles photos, la personne a nos références. Si elle peut nous donner un livre ou deux livres voire 100 livres, on prend.
Quelle a été la réaction de tes parents quand tu as eu l’idée de créer cette bibliothèque ?
Ils étaient contents. J’ai eu énormément de discussions avec eux. On est toujours en train de prendre des notes. Je dirais même que 60% de ce projet a été fait grâce à eux.
Qui peut avoir accès à la bibliothèque ?
La bibliothèque est ouverte à tous. Mais, j’ai essayé de prendre quand-même comme public cible les adolescents de mon âge. On a plus de livres pour cette tranche d’âge, quelques livres pour adultes et aussi des livres pour les plus jeunes.
Comment va fonctionner la bibliothèque ?
Il suffit de venir s’inscrire et de lire le règlement. La bibliothèque est gratuite. On peut emmener le livre mais, il faut aussi le ramener. On insiste sur le délai imposé parce que la bibliothèque demande beaucoup d’ordre. Il faut que tout le monde s’engage à respecter toutes les conditions.
» On est dans un monde qui change constamment. Mais c’est beaucoup plus facile de s’y adapter quand tu parles anglais »
Qu’est-ce qui fait la particularité de cette bibliothèque ?
Premièrement, c’est le fait qu’elle soit bilingue. L’anglais est vraiment un atout. On est dans un monde qui change constamment. Mais c’est beaucoup plus faciles de s’y adapter quand tu parles anglais. Deuxièmement, on a essayé de créer un endroit assez convenable. On a fait en sorte que l’ambiance soit intéressante. Aussi, tu peux avoir accès aux catalogues de la bibliothèque grâce à ton téléphone. Comme les adolescents sont beaucoup plus connectés sur le net avec leurs téléphones, c’est une manière de trouver une occupation.
Une fois que la bibliothèque sera installée , quelles sont tes attentes ?
On peut avoir des livres et n’avoir personne pour lire. La deuxième partie du projet consiste à avoir énormément d’abonnés à la bibliothèque et travailler sur des stratégies pour acquérir plus de livres africains car j’ai remarqué que dans les bibliothèques, beaucoup de livres viennent d’ailleurs.
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En moins d’une semaine de l’ouverture de la bibliothèque, quel bilan tu peux déjà faire?
Déjà la collecte a dépassé les attentes. Je ne suis pas loin de 200 livres et il y a des livres qui continuent de venir. Je suis plus que satisfaite.
Qu’est-ce que tes camarades pensent de ton projet?
Ce n’est pas simple. 60% de Change sont des non-lecteurs. de les emmener à aimer la lecture. Ils sont assez surpris . Ils trouvent même que j’ai été audacieuse mais, ils soutiennent beaucoup le projet. J’ai énormément de soutien de la part de mes camarades.
Entretien réalisé par Marie Sorgho