Le 25 mai marque l’anniversaire de la signature des accords de l’OUA (Organisation de l’Unité Africaine) en 1963. A l’occasion de cette journée mondiale de l’Afrique, le ministre de l’Intégration africaine et des Burkinabè de l’extérieur, Paul Robert Tiendrébeogo a livré un message dont nous vous proposons l’intégralité dans les lignes qui suivent.
Le 25 mai 1963, 32 Chefs d’Etat africains se sont retrouvés à Addis
Abéba, la capitale éthiopienne, pour porter sur les fonts baptismaux,
l’Organisation de l’Unité africaine (OUA), aujourd’hui Union africaine
(UA).
Tout en saluant à nouveau la vision et le courage de ces pères
fondateurs, nous jetons un regard critique sur la vie de notre
organisation commune, pour devoir à la vérité de reconnaître que
celle-ci a, tant bien que mal, apporté une contribution significative à
l’œuvre collective d’édification d’une Afrique capable de satisfaire les
besoins fondamentaux de ses populations, de préparer un avenir
radieux pour ses enfants d’aujourd’hui et de demain, et d’occuper
pleinement sa place dans le monde.
Certes, les défis sont encore nombreux et plus complexes que
jamais, mais notre détermination à construire l’Afrique que nous
voulons, telle que définie dans l’Agenda 2063, doit rester intacte.
C’est dans cet esprit que les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont
placé l’année 2020 sous le thème « Faire taire les armes : créer des
conditions propices au développement de l’Afrique ». Réaffirmer
l’interdépendance entre paix, sécurité et développement, œuvrer à
éteindre tous les foyers de tension, et affecter les ressources
adéquates aux projets de développement, c’est là tout le sens de ce
choix.
Malheureusement, à peine engagés dans la dynamique de ce thème,
voilà que nos pays doivent faire face à la COVID-19, cette pandémie
pernicieuse qui, quand elle n’a pas mis un coup d’arrêt à l’exécution
des programmes, l’a fortement ralentie. Nul n’ignore aujourd’hui
l’ampleur de l’impact socio-économique et même politique de cette
pandémie.
Aussi, le thème de la célébration de la Journée de l’Afrique 2020
s’est-il naturellement imposé : « Sécurité sanitaire dans le contexte
de la COVID-19 ».
Force est de reconnaître que les pays africains ont su prendre les
mesures nécessaires, y compris les plus douloureuses, pour faire
face à la pandémie dès son apparition.
Quant à l’UA, elle a également développé des initiatives au niveau
continental, aussi bien pour la coordination de la lutte et des
stratégies de réduction de l’impact socio-économique de la maladie
que pour l’implication des jeunes dans la réponse et la mobilisation
des ressources, avec notamment la mise en place du Fonds
continental de solidarité-Fonds de réponse contre la COVID-19.
Cette irruption de la pandémie nous offre l’occasion de consolider le
processus d’intégration africaine.
En l’occurrence, et en référence au thème de l’année, elle constitue
une interpellation supplémentaire à renforcer cette indispensable
synergie pour faire taire les armes, au regard de la situation
sécuritaire préoccupante à travers le continent.
Dans la zone du Sahel en particulier, les Etats sont confrontés aux
attaques des groupes terroristes et criminels, sources notamment
d’une crise humanitaire sans précédent. Aussi convient-il d’accorder
une attention particulière à ces « nouvelles » menaces à la paix et à
la sécurité que sont le terrorisme et toutes les formes d’extrémisme
violent qui sapent la stabilité et les efforts de développement des
Etats. En venir à bout nécessitera non seulement des actions de
prévention et d’alerte précoce, mais également la solidarité, la
mutualisation des efforts et des moyens, ainsi qu’une coordination
efficace au niveau continental.
Faut-il le souligner, les causes profondes des conflits et des crises
sont connues. Il s’agit, entre autres, de la pauvreté, des difficultés
économiques, des inégalités, de la mauvaise gouvernance, du non-
respect des droits de l’homme, de l’exclusion, sans oublier certaines
ingérences extérieures. Il y a donc urgence à travailler résolument à y
apporter les réponses qui siéent.
Il est également impératif de travailler à démanteler les réseaux de
trafics d’armes, de stupéfiants et d’êtres humains, qui sont les sèves
nourricières des entreprises terroristes et de déstabilisation des Etats.
Dans cette entreprise, chaque citoyen du continent, dirigeant africain,
Etat membre de l’UA, et la Commission elle-même, doivent
s’engager dans l’action avec détermination.
Il faut à cet égard noter, pour s’en féliciter, la prise de conscience
croissante des jeunes qui s’inscrivent chaque jour plus nombreux
dans la dynamique de la réalisation du rêve panafricaniste tel que
porté par les pères fondateurs de l’OUA. Gageons que par leurs
convictions, leur enthousiasme, et surtout leur foi en un avenir
meilleur, ils feront des frontières de nos Etats, des symboles de paix
et de concorde et non des vecteurs de division ; des charpentes
pour construire des ponts et non des murs de séparations ; des
ouvertures sur l’autre et sur le monde et non les prétextes
d’exacerbation des nationalismes qu’elles ont, hélas, souvent été.
En ce jour de commémoration, l’Afrique doit se souvenir de sa
diaspora, et continuer de lui accorder la place qu’elle mérite. En
effet, la contribution multiforme et multidimensionnelle de celle-ci au
développement et au rayonnement du continent, la ferveur de sa
jeunesse, la force de propositions que constitue son intelligentsia,
sont autant d’atouts et de richesses pour construire l’Afrique de
demain.
A 57 ans, l’Union africaine est à une étape décisive de son évolution.
Et la prochaine opérationnalisation de la Zone de libre-échange
continentale africaine, dont elle a été le principal architecte, ouvre au
continent de belles perspectives en matière d’échanges intra-
africains et avec le reste du monde.
En se débarrassant des armes, en mettant fin aux conflits et en
éteignant tous les foyers de tension, l’Afrique créera alors les
conditions optimales de sa prospérité et de son développement.
Bonne commémoration !
Dieu protège l’Afrique !