Le 9 septembre 2019, le ministre en charge du commerce a procédé à la suspension de la délivrance des autorisations spéciales d’importation d’huile alimentaire et de sucre. L’annonce a été faite dans un communiqué. Quels sont les avantages et dans une moindre mesure, les inconvénients de cette mesure gouvernementale ?
La suspension de la délivrance des autorisations spéciales d’importation d’huile alimentaire et de sucre intervient « suite aux différentes concertations entre le ministère du commerce et les distributeurs dans le but de trouver des dysfonctionnements du marché de l’huile alimentaire et du sucre » selon le communiqué du Ministre en charge du commerce, Harouna Kaboré.
On se rappelle que le secteur de la production nationale d’huile alimentaire et celui du sucre étaient confrontés à la mévente desdits produits de grande consommation. Une situation paradoxale dans la mesure où la production nationale est estimée en 2018 à 50 000 tonnes avec un besoin d’environ 100 000 tonnes pour l’huile alimentaire. Concernant le sucre, la SN-SOCUCO produit entre 30 000 et 35 000 tonnes par an alors que la consommation nationale est estimée à 120 000 tonnes. Pour la campagne 2017/18, un stock invendu de 9 500 tonnes avait été enregistré.
La mesure sonne donc comme un ouf de soulagement pour les producteurs locaux de ces produits de grande consommation. En effet, dans l’urgence, elle permettra d’abord aux entreprises locales d’écouler leurs productions. Les huileries locales croulent sous le poids de la mévente, menacées par les importations anarchiques d’huiles et les produits frauduleux déversés sur le marché par les unités clandestines de fabrique d’huiles. En outre, du côté de la nationale du sucre, la société vit, depuis la campagne sucrière de 2014/15, un cycle infernal de mévente. Entre la concurrence des produits importés, la fraude, les faveurs de l’État aux opérateurs économiques et l’obsolescence de son équipement, l’unique producteur de sucre au Burkina Faso battait des ailes. Donc, il était nécessaire de réguler les importations pour protéger les industriels nationaux.
Ensuite, la mesure gouvernementale pourrait permettre le contrôle de la qualité des huiles alimentaires. En effet, les rayons des commerces étaient bondés de produits oléagineux venus de Côte d’Ivoire et d’Asie pour la plupart, ceci au détriment des huiles « made in Burkina ». Pis, ces huiles importées souvent de qualité douteuse sont un danger pour le bien-être des consommateurs. Également, ces dernières années, on assiste à la prolifération des fabriques clandestines d’huiles à base d’ingrédients toxiques. Faits récents, en mars 2015, environ 18000 litres d’huile frelatée ont été saisis dans les encablures de Ouagadougou. Un mois après, soit en avril, a suivi la saisie d’au moins 25 000 litres d’huile impropre à la consommation à Bobo-Dioulasso, la 2ème ville du pays. Après la suspension des mesures d’importation, place maintenant au contrôle des huiles commercialisées.
Enfin, au titre des avantages, c’est la promotion du label « produisons ce que nous consommons, consommons ce que nous produisons » qui est mise en œuvre à travers cette mesure gouvernementale. Les huileries locales se servent des graines de coton produit au Burkina pour fabriquer l’huile et cela peut booster la production du coton déjà prisé par les tisseuses de pagnes Faso Danfani. Réglementer l’importation des huiles et du sucre revient donc à sauver les industries locales.
En rappel le ministère en charge du commerce avait interdit le 6 septembre 2019, la production, l’importation, la commercialisation et la détention de boissons alcoolisés en sachet et en bouteille P.E.T inférieur à 30 cl. Cette mesure a été saluée à sa juste valeur car ces boissons « frelatées » étaient devenues un problème de santé publique qui nuit à la frange jeune de la population.
Davy YAMEOGO