Autrefois, appelé par certains « aliment du pauvre », du fait de son coût abordable, le haricot, Niébé ou « Beinga » , se fait de plus en plus rare dans les assiettes à cause d’une hausse vertigineuse des prix. Restauratrices et consommateurs qui ne savent plus à quel saint se vouer….
Étudiant à Koudougou, Issaka Sawadogo, de passage à Ouagadougou, s’alimente principalement chez les restauratrices de rue. Jadis, avec 150 Fcfa de « Beinga », son repas principal, sa journée était gagnée.
Mais, depuis quelques semaines, il ne mange plus à sa faim au même prix de haricot. « La dernière fois, j’ai acheté « Beinga » à 500 F avec un ami mais ça ne nous a pas suffi. Aujourd’hui, j’ai acheté pour 200F moi seul et c’est trop petit », affirme-t-il alors qu’il venait de terminer un plat.
Restauratrice depuis 19 ans au bord du goudron à Kossoghin, Mayinga Awa supporte difficilement l’augmentation du prix du haricot, car cela complique sa relation avec les clients. « Je servais le plat à 150 FCFA avec huile mais ce n’est plus possible. Désormais, je sers à partir de 200 FCFA avec de l’huile. Malgré ça, je ne gagne plus de bénéfice et les gens se plaignent », explique-t-elle.
Sanata Ouédraogo, également restauratrice qui s’approvisionne au marché de Arbyaar, affirme que le « Plat yoroba » (instrument de mesure local de 3,5 kilos) est passé très rapidement de 1400 F CFA à 2500 F CFA. Même si elle sert le plat à 150 FCFA, Sanata reconnaît qu’il est difficile de manger à sa faim, avec une telle quantité.
Korotime Ouédraogo, ménagère et mère d’une fille, est également désemparée par cette augmentation. « Ça fait désormais plus de deux semaines que j’ai préparé le haricot chez moi à la maison à cause de la hausse du prix. J’ai dû acheter un petit sachet de 600 FCFA. J’ai voulu acheter le plat mais; c’était trop cher pour moi », raconte-t-elle. Face à cette difficulté, Korotime nourrit difficilement sa famille avec le peu d’argent qu’elle gagne. « C’était la nourriture salvatrice de ma famille. On en préparait beaucoup à la maison. Mais, le Beinga est un luxe de nos jours », ajoute-t-elle.
Lire aussi : Hausse du prix de la pomme de terre, les raisons
À Sankar-Yaar, un des marchés les plus fréquentés de Ouagadougou, le sac de haricot se vend entre 65 000 F et 50 000 F (au 7 octobre 2024). Abdoul Azize Zida, grossiste de céréales dans ledit marché, explique : « Le haricot n’a pas bien donné l’année dernière. Quand nous récupérons le haricot avec les producteurs, nous ne fixons pas de prix auquel doit se vendre le haricot. Le prix du sac de haricot varie chaque jour que Dieu fait. Il y a deux semaines, je vendais le sac de 100 kg à 70 000. Mais, aujourd’hui, c’est moins que ça ». Pour lui, l’augmentation du prix du haricot ne vient pas des commerçants. «Il y a environ trois mois, le haricot était en manque au Burkina Faso et on importait depuis le Niger. Même avec ça, ça venait par convoi en passant par Dori », explique-t-il.
Selon Abdoulaye Zida, commerçant de haricot depuis 5 ans, « les clients achètent avec les mines serrées. Chez moi, le plat coûte 2500 FCFA non négociable. Toutefois, il y a le haricot de la nouvelle année que je peux donner à 2350 mais ils ne veulent pas ça », affirme-t-il.
Selon les statistiques du Système d’information des marchés (SIM) de la Société nationale de gestion des stocks de sécurité (Sonagess), les prix moyens d’achat aux producteurs ont été de 150 FCFA à 250 FCFA/kg pendant les cinq dernières années. Les prix au consommateur, au détail, atteignent 450 FCFA soit 1750 FCFA le plat « yoroba ». C’est dire que l’augmentation des prix du Niébé de cette année est exceptionnelle. Le constat sur le marché montre le niébé, exceptionnellement cout plus cher que l’arachide par exemple.
Afin de comprendre la flambée du prix du haricot, nous avons échangé avec Dr Fousséni Traoré, maître de Recherche à l’Institut de l’Environnement et de Recherches Agricoles du Burkina Faso (INERA). Selon lui, la production du niébé dans la zone de l’ouest est entravée par l’excès d’humidité et la pression des ravageurs dont Maruca vitrata, une chenille réputée pour ses attaques destructrices sur les plantes.
Ces facteurs affectent les rendements et la qualité des graines. Toute chose qui pourrait expliquer la rareté de ce produit précieux sur le marché. Et le pire est envisagé encore cette année car la pluviométrie trop abondante augure encore une baisse des rendements.
Abdoulaye Ouédraogo
Merci à vous pour l’intérêt que vous portez à Queen Mafa, le média qui conjugue l’actualité au féminin. Vous pouvez désormais suivre notre chaîne WhatsApp en cliquant sur : https://whatsapp.com/channel/0029VaD231n84Om86ADZEE02
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.