L‘excision au Burkina est une pratique traditionnelle qui a la peau dure. La majorité des mutilations sexuelles est pratiquée par des exciseuses traditionnelles sur des jeunes filles ayant moins de 5 ans. Malgré les campagnes de sensibilisation et les actions de répression, l’excision continue de faire des victimes. Le 27 septembre 2024, une fillette excisée à Bobo-Dioulasso a frôlé la mort.
Le cœur lourd, Dr Eliane Kiéma alertait sur le sort d’une fillette de 18 mois, victime d’une excision. « Aujourd’hui, une petite fille se bat pour sa vie, laissée et terriblement affaiblie après avoir été vidée de son sang », déplorait-elle.
Selon la pédiatre, c’est un acte regrettable qui oblige toute la communauté et la société entière à voir la situation de l’excision, autrement. « À cet âge, elle devrait être en train de rire, jouer, découvrir le monde à travers ses yeux d’enfant. Mais au lieu de cela, elle est entre la vie et la mort », regrette-t-elle.
Ces mots qui résonnent comme un cri d’alarme, rappellent que l’excision, loin d’être une pratique ancestrale anodine, est un acte de violence aux conséquences graves, souvent dramatiques, comme en témoigne le cas de cette petite fille.
Une responsabilité collective
Contactée quelques jours plus tard, le Dr Kiéma confiait sa déception face à la persistance de ces actes. « Je ne m’imaginais pas que cette pratique continuait de plus belle », a-t-elle déclaré.
Selon les dires de Dr Kiéma, la petite est venue d’un village environnant. Évacuée au CHU pour une meilleure prise en charge, la fillette après avoir reçu une transfusion sanguine se porterait mieux mais, devrait encore lutter contre une infection du site d’excision.
Si la petite fille a survécu grâce à une transfusion sanguine, les séquelles physiques et psychologiques de cette épreuve seront certainement durables.
« En tant que Société, nous ne pouvons plus détourner le regard », fait observer Dr Kiéma. Cette histoire tragique interpelle chacun d’entre nous. En tant que société, nous avons le devoir de protéger les enfants et de mettre fin à ces pratiques barbares. Les professionnels de santé, les autorités, les communautés, chacun a un rôle à jouer pour que l’excision devienne un lointain souvenir.
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Un fléau tenace malgré les lois
Les chiffres sont alarmants : 13% des filles de 0 à 14 ans sont victimes de mutilations génitales féminines. Malgré l’interdiction légale de l’excision au Burkina Faso et les campagnes de sensibilisation, cette pratique persiste. En effet, l’article 380 du code pénal, punit d’un emprisonnement de six mois à trois ans et d’une amende de 150.000 à 900.000 Francs CFA ou de l’une de ces deux peines, quiconque porte ou tente de porter atteinte à l’intégrité de l’organe génital de la femme par ablation totale, par excision, par infibulation, par insensibilisation ou par tout autre moyen. Si la mort en résulte, la peine est un emprisonnement de cinq à dix ans.
Les peines sont portées au maximum si le/la coupable est du corps médical ou paramédical. La juridiction saisie peut en outre prononcer contre lui/elle l’interdiction d’exercer sa profession pour une durée qui ne peut excéder cinq ans.
Le code va plus loin notamment en son article 382 qui prévoit une amende de 50.000 à 100.000 Francs CFA, toute personne, ayant connaissance des faits d’excisions prévues et qui n’en avertit pas les autorités compétentes.
Françoise Tougry
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