Elle fait partie des rares femmes, à exercer la chirurgie cervico-faciale au Burkina Faso, une spécialité qui traite les maladies du visage, du cou, du nez et de la gorge. Avec courage et abnégation, elle se donne à cœur joie, à son métier. Si vous tombez sur elle, vous êtes sans aucun doute, entre de bonnes mains. Dr Isabelle Gnakadja Fafadji Boncoungou, chirurgienne cervico-faciale lève le voile sur son parcours.
Sereine, empathique, infatigable, avec un moral d’acier qui sait concilier sa vie de famille et son travail. C’est ainsi qu’on pourrait décrire Isabelle Gnakadja Fafadji, épouse Boncoungou, chirurgienne cervico-faciale. D’origine togolaise, Gnakadja Fafadji atterrit au pays des hommes intègres en août 2002 suite à la mutation de son père, fonctionnaire international.
De 2002 à 2013, elle poursuit des études en médecine à l’université Joseph Ki-Zerbo. Un parcours qu’elle estime assez compliqué car les études ne sont pas faciles.
A l’issue de son stage à l’hôpital Yalgado, et son diplôme de docteur en médecine en poche, elle dépose ses valises en tant que médecin généraliste, en juin 2013 à la clinique Notre Dame de la Paix. Au regard de son engouement pour la profession de médecin et le fait qu’elle prenne à cœur son travail, sa hiérarchie lui confie certaines tâches qu’elle accomplit d’ailleurs, avec brio.
En 2018, elle quitte la clinique et revient quatre ans plus tard comme spécialiste en chirurgie cervico-faciale. Ils sont une quarantaine de médecins en oto-rhino -laryngologie et chirurgie cervico-faciale (ORL-CCF) au Burkina Faso dont une quinzaine de femmes. « Quand les gens viennent, ils ne sont pas surpris de voir une femme médecin ORL. Mais, quand on parle d’opération, ils sont surpris, voire impressionnés et ils nous encouragent. J’ai beaucoup de patients qui sont reconnaissants. Lorsqu’ils sont satisfaits, ils n’hésitent pas à nous le dire et cela fait vraiment chaud au cœur », se réjouit-elle.
Une vingtaine de patient.e.s, c’est à, peu près, le nombre de personnes que Dr Boncoungou consulte par jour. Concernant la chirurgie en ORL, la plupart des patients majoritairement des enfants sont opérées pour des végétations adénoïdes ou des problèmes d’angines. Pour les femmes, c’est surtout le problème de goitre cervicale.
Soigner des patients est admirable mais, demande des nerfs d’acier. Les médecins se retrouvent régulièrement dans des situations extrêmement délicates où la vie du patient dépend en grande partie de leurs interventions. Ils doivent souvent, agir dans l’urgence et oser prendre des décisions.
L’une des difficultés rencontrées par la chirurgienne est le fait de convaincre le patient de la nécessité de l’intervention. Surtout, quand il s’agit du cou, les gens ont peur. « Dans toute intervention, il y a toujours un risque. Mais, avec l’expérience et les mesures qui sont prises, les risques sont minimisés. Avant de rentrer dans le bloc, je prie. Je confie le malade et l’intervention à notre seigneur. Je fais des petits récapitulatifs des gestes afin d’exécuter avec sécurité, les gestes techniques avant d’entrer », rassure-t-elle.
Il y a de cela deux ans, la première personne que Dr Boncoungou a opérée est une femme souffrant d’angines à répétition. Elle se rappelle l’avoir fait sans stress.
Une autre difficulté, c’est d’annoncer certaines nouvelles qui ne sont pas faciles à digérer. « J’ai présentement un cas que j’ai opéré. On est parti d’un cas banal. Mais, lorsqu’on a fait les examens, les résultats ont montré que c’est un cancer, un cas un peu compliqué. Comment accompagner le malade, pour lui montrer que le traitement est long, que les pronostics ne sont pas bons ? C’est mon souci actuellement », s’inquiète-t-elle.
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Le chouchou des patients
Souffrant régulièrement d’infections ORL et de sinusite, Beybaloun Flora Bouda Kantiono est ses filles sont les patientes de Dr Boncoungou depuis presque trois ans. « Elle a une approche très humaine et altruiste de ses patients et t’amène à mieux anticiper sur les maladies ORL. Mes filles sont devenues indépendantes et savent se prendre en charge lorsque des signes d’infection ou de crise de sinusite se présentent. Cela a impacté positivement leurs assiduité à l’école », indique maman Flora.
Elle renchérit « Pour ce qui me concerne. C’est toujours un plaisir de me rendre à mon contrôle ou à une consultation de routine. Cette médecin est spéciale et très professionnelle. En plus, elle a détecté une anomalie santé de ma première fille qu’aucun médecin n’a pu détecter depuis des années », confie dame Bouda.
En plus de sa casquette de médecin spécialiste, Dr Boncoungou se voit confier une responsabilité assez particulière, à savoir la prise en charge des patients vivant avec le VIH sida, des âmes très fragiles.
Douée pour ce travail, elle réussit à tirer son épingle du jeu et à redonner le sourire à ses patient.e.s grâce à sa douceur, sa patience, son professionnalisme, son sens de l’humain, son sens de l’écoute et l’ambiance conviviale qu’elle instaure autour d’elle et avec le personnel. On pourrait dire qu’elle est le chouchou des patients tant elle est réclamée par ces derniers.
« Dr Bouncoungou que nous appelons communément Gnakadja est toujours joviale car je ne l’ai jamais vue, fâchée. Je ne sais même pas comment elle se débrouille pour ne jamais être en colère avec qui que ce soit », témoigne Dr Fidèle Sawadogo, chef du service de chirurgie à la clinique Notre Dame de la Paix.
Selon ce dernier, Gnakadja Fafadji était déjà une stagiaire spéciale qui se démarquait des autres, lorsqu’il l’a rencontrée en 2006.
18 ans après son internat à l’hôpital Yalgado Ouédraogo, il s’en rappelle comme si c’était hier. « J’ai pu remarquer en elle, un certain calme, une jeune fille respectueuse des patients et des autres. Quand elle vient, elle bosse jusqu’à la descente. Parfois, elle dépasse l’heure de la descente », se remémore-t-il.
Selon Dr Fidèle Sawadogo, Gnakadja Fafadji, est une étudiante bien assidue et très proche des malades. Auprès des malades alités à même le sol, elle s’asseoit elle aussi, à même le sol, pour faire leurs dossiers.
La seule chose qu’on reproche à Gnakadja Fafadji, c’est d’être trop gentille. Mon défaut, les gens disent que je suis trop généreuse, indique-t-elle en souriant, je ne me fâche presque jamais. « Mon mari a l’habitude de dire que je suis trop naïve. Personnellement, je ne vois jamais le mal en mon prochain. Tout ce qui me préoccupe, c’est d’aider mon entourage. J’ai trois filles. En tout, cas elles ne se plaignent pas de m’avoir comme mère », lance-t-elle d’un air taquin.
Témoignage de son époux
« Je voudrais développer le service ORL »
Au niveau du personnel permanent, Gnakadja Fafadji est la seule chirurgienne qui intervient pour le compte de l’ORL au profit de la clinique. Elle évoque des motifs de satisfaction par rapport à la médecine notamment la médecine endoscopique. « C’est une chirurgie qui évite de faire de grande ouverture par exemple, dans certaines complications de sinusite. Au lieu qu’on soit obligé de casser la mâchoire pour atteindre les sinus, on utilise une caméra en passant par le nez sans laisser de cicatrices intérieures. Ça, c’est déjà une avancée », apprécie-t-elle.
La médecine est une discipline très large qui évolue à une vitesse fulgurante. Pour cela, Fafadji Gnakadjia espère une amélioration de la prise en charge des patients, du matériel de travail, des besoins de formations sur place sans avoir à se rendre obligatoirement à l’étranger pour les renforcements de capacités.
En termes d’ambitions, Dr Boncoungou espère dynamiser davantage la prise en charge des patients vivants avec le VIH et développer le service ORL de la clinique. A long terme, elle envisage ouvrir sa propre structure. « La connaissant, je sais qu’elle va y arriver. Je ne peux que l’encourager », soutient Dr Sawadogo.
Françoise Tougry
Abdoulaye Ouédraogo
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