Aïda Bélemtougri s’est lancée dans le domaine de la livraison de colis afin de joindre les deux bouts. Son petit business grandit de jour en jour au point où, celle qui était encore étudiante en génie civil abandonne ses études pour se consacrer à sa passion.
S’il y a des qualités qui sautent aux yeux, chez Aïda, c’est bien son physique et sa courtoisie. Femme ronde mais souple, habillée en tee-shirt et pantalons, casque sur la tête, sac de livraison au dos, cache-nez en main et chaussures de sécurité, c’est ainsi que se présente mademoiselle Bélemtougri devant ses client.e.s.
Orpheline de père, Aïda et sa petite sœur ont grandi auprès d’une mère aimante et courageuse qui a pris soin, toute seule de ses deux enfants, grâce à son petit commerce. Sa bonne volonté et les ressources financières maigres ne suffisent pas à prendre en charge l’éducation de sa progéniture. Aïda décide donc, de prendre les choses en main.
Pour joindre les deux bouts, Aïda, élève en classe de 1re trouve une activité dans un kiosque où après les cours, elle travaille. Mais, finir à des heures tardives tous les jours à un rythme soutenu ne convient pas à ses performances et risque d’influencer son cursus scolaire. « Après les cours, je jonglais. Je finissais à 23 heures et le matin, quand je viens en classe, je dors. J’ai fait ça, durant un mois », explique-t-elle.
Le déclic
Ce train de vie est loin d’être ce à quoi, rêve Aïda . L’adolescente se tourne donc, vers de petits boulots pour pouvoir subvenir à ses besoins et aider sa famille : vendeuse de pièces détachées, puis d’attiéké aux abords des rues du Salon international de l’Artisanat de Ouagadougou (SIAO). Sauf que ça ne nourrit pas vraiment son homme. Heureusement, sur son lieu de vente d’attiéké, naît la chance de la livraison. « Un jour, une dame est venue acheter des glacières et voulait un livreur. La commerçante n’avait pas de livreur. Je me suis proposée de lui livrer sa marchandise et elle a accepté », souligne-t-elle.
Convaincue que l’école n’est pas la seule voie de réussite, elle s’oriente vers la livraison, un métier autrefois, réservé aux hommes et crée son entreprise Aïda Express. Aïda s’est lancée dans ce métier avec des moyens de bord : sa moto personnelle et de petites économies tirées d’une tontine. Débrouillarde, Aïda continue son petit bonhomme de chemin. Au fil du temps, elle fait encore de petites économies pour se procurer une deuxième moto, confiée à ses collaborateurs.
Elle quitte finalement les bancs alors qu’elle est étudiante en génie civil pour se consacrer à cette activité. « Il y a des gens qui ont réussi sans passer par l’école et qui emploient les gens qui ont des diplômes », estime-t-elle.
La livraison, une source de thérapie pour Aïda
Serviable mais très Impulsive, Aïda s’énerve très vite et perd facilement le contrôle de ses actes. Heureusement pour cette jeune dame, elle a retrouvé en ce métier, la livraison, une source de consolation, d’apaisement et de remède à sa nervosité. « Je remercie la livraison parce que maintenant, je suis devenue calme (Les mains superposées et sourire aux lèvres, elle touche son cœur comme pour signifier, de la douceur). Ce n’est pas un travail facile. Quand tu as gros cœur, tu ne peux pas exercer ce métier », dit-elle, ce jour 29 novembre.
Cette patience lui permet de communiquer, de savoir écouter et de gérer sa clientèle. Reconnue pour son service de qualité et son sens de la responsabilité, la jeune entrepreneure voit sa clientèle croître. « S’ils me contactent une fois, c’est eux qui me recommandent à d’autres personnes parce que je fais bien mon travail », indique-t-elle.
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La rage de réussir
Bien vrai que coté physique, Aïda est avantagée, mais, le métier en lui-même est très épuisant. Soulever, attacher, colporter, détacher, déposer, parcourir des kilomètres ; Une routine très compliquée qu’Aïda accomplit avec passion, malgré la douleur à l’épaule dont elle souffre. « S’ils ont besoin d’une livraison urgente, j’attache le colis rapidement sur ma moto, sans attendre l’aide de quelqu’un et je pars livrer moi-même », affirme-t-elle, digne de confiance. L’une des qualités les plus précieuses chez Aïda, est sans conteste, son dévouement au travail.
Selon Aïda, beaucoup de gens considèrent la livraison comme un métier banal, sans importance. Mais, pour elle, ça compte énormément. Enthousiaste, elle reste concentrée sur ses objectifs. Son expérience montre clairement qu’elle est très ambitieuse.
Avec un minimum de 10 clients par jour, elle sait se forger une image et fidéliser une certaine clientèle à travers le maniement efficace des colis. Cette aventure dure depuis trois ans. Trois années de persévérance, de dur labeur et surtout de rage. La rage de réussir dans ce domaine qu’elle a choisi, la rage de faire de Aïda, un modèle pour les autres, une femme inspirante. « J’aimerais avoir des tricycles, des motocyclistes et deux motos pour assurer le transport des marchandises. Je veux également me faire connaître par les commerçants, des chauffeurs de tricycles et même des camions à la longue pour m’accompagner dans le transport des colis notamment dans la sous-région. Je veux faire aussi des déménagements si j’ai les moyens », souhaite-t-elle.
A 25 ans, Aïda Bélemtougri entend faire de sa passion, une carrière florissante.
Françoise Tougry