Ce mardi 7 novembre 2023, l’Initiative Pananetugri pour le Bien-être des Femmes (IPBF) a présenté les résultats d’une étude sur la situation de la protection des droits des filles, des femmes et des Défenseur.e.s des Droits humains (DDH) dans les régions de l’Est, de la Boucle du Mouhoun, du Centre et du Centre-Nord. L’objectif est de faire l’état des lieux de la protection et du respect des droits humains en temps de crise sécuritaire et humanitaire.
Les recherches d’une d’une durée de deux mois, ont mis à nu, une situation de crise sécuritaire et humanitaire exacerbée par l’aggravation des Violences basées sur le Genre (VBG) et des difficultés liées à la satisfaction des besoins sociaux de base. Ces besoins ont trait à l’accès à l’information, aux soins, au logement, à l’alimentation, à la sexualité, à la lingerie et aux loisirs.
Le sociologue Bacye Yisso a souligné que la crise engendre des recompositions de rôles sociaux. En effet, des élèves filles qui ont encore la chance de poursuivre les cours viennent avec leurs frères dans les zones plus sécurisées pour pouvoir étudier. Elles deviennent ainsi cheffes de ménage. Principalement pour la population hôte, 33% de femmes disent être déscolarisées du fait de leurs conjoints. « Toutes ces femmes sont en quelque sorte, des sans voix. Il faut commencer par les protéger, pour qu’elles mettent en lumière ce qu’elles vivent afin qu’il y ait des interventions sociales en leur faveur. Il faut des personnes physiques et des ONG pour les écouter », a clarifié l’enseignant chercheur.
Les consultants ont préconisé une batterie de solutions parmi lesquelles, encourager l’assainissement du cadre de vie des PDI par un appui à la mise en place d’associations sensibles à la thématique, apporter une assistance adéquate aux FDI et à celles des populations hôtes quant à la prise en charge de leurs besoins fondamentaux, accompagner les filles en situation de déscolarisation. A cela s’ajoutent, la sensibilisation des jeunes filles et femmes sur l’utilisation des méthodes contraceptives, les bonnes pratiques en matière d’alimentation des enfants et des plaidoyers auprès des structures financières étatiques et des institutions bancaires pour favoriser l’accès au crédit, aux jeunes filles et femmes.
Pour aboutir à ces résultats, l’équipe a procédé entre autres, par une recherche documentaire, une enquête par questionnaire, des entretiens individuels, un focus group, un guide de lecture, une analyse thématique. 803, c’est le nombre de personnes interrogées dans les quatre régions. 46,07% sont des filles et 53,93% de femmes (déplacées internes et population hôte) âgées de 15 à 40 ans. L’âge, le niveau d’instruction, la situation matrimoniale et la profession sont les variables pris en compte.
Au cours des échanges, les participants ont exprimé leurs préoccupations. Ils ont estimé que la marge d’âge de la cible (15 à 40 ans) est assez limite. L’équipe aurait dû aller au-delà de cette tranche d’âge. Ils ont également trouvé que l’échantillon n’est pas assez représentatif. Ils ont en outre, suggéré de revoir certains termes utilisés dans le document qui pourraient prêter à confusion. Les participants ont de plus relevé le fait que dans la Boucle du Mouhoun, beacoup de déplacés internes sont en location. Par conséquent, ils n’ont pas été pris en compte.
En réponses à ces préoccupations, Bacey Yisso a indiqué qu’en ce qui concerne la tranche d’âge, c’est le domaine d’intervention de l’IPBF qui l’impose. « Pour l’échantillon, on ne peut pas parler de problème de représentativité car la taille a été calculée en fonction de formule scientifiquement reconnue. On a utilisé la base de données de la CONASUR. Donc, le problème de représentativité ne se pose pas », a-t-il mentionné.
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Aux dires de Zakaria Bayoulou, directeur régional des droits humains de la promotion de la citoyenneté et de la paix au Centre-Nord, l’étude est pertinente dans ce sens où le contexte sécuritaire et humanitaire recommande et reconnaît les réalités chez les femmes et les filles ainsi que chez les DDH. « Sans une connaissance de leur réalité de tous les jours, on ne peut pas apporter des solutions convenables », a-t-il affirmé. Zakaria Bayoulou souhaite que l’IPBF continue de mener les actions sur le terrain et à être disponible pour apporter des solutions.
Rosine Florence Soubeiga, animatrice au sein de l’Association d’Appui et d’Éveil Pougsada (ADEP) a apprécié le document à sa juste valeur. «Des insuffisances, il n’y a n’a pas eu tellement. Ce qui est intéressant, c’est que l’étude en elle-même en valait la peine et elle permet à nous, les associations de savoir comment intervenir dans les activités à mener par rapport à ce projet », s’est-elle réjouie.
Pour la suite qui sera donnée à cette étude, Abibou Kabré, juriste et chargée de projet a fait savoir que l’IPBF en collaboration avec les Organisations de la Société civile (OSC) partenaires et les services techniques de l’État, a prévu des séances de formations en métiers pour les femmes et les filles afin de permettre leur autonomisation et de se défaire de l’assistance humanitaire permanente.
En termes de recommandations, ils ont proposé de vulgariser la loi 039 portant promotion des Défenseur.e.s des Droits humains et de faire ressortir dans le document, les infractions et les violations, les arrestations arbitraires, les disparitions, les détentions aux secrets, les enlèvements, les vindictes populaires, l’exil. Autant de maux dont souffrent souvent ces défenseur.e.s.
Une participante a proposé à l’IPBF de développer une stratégie pour la valorisation dudit document au niveau national et international, de créer un cadre pour centraliser les études commanditées par les associations et ONG, ce qui va faciliter les choses. Selon elle, la bibliothèque de Mousso News, un média burkinabè qui fait la promotion du leadership féminin, pourrait aussi accueillir ce document.
Françoise Tougry