Pour beaucoup, le tricotage est un simple passe-temps. Mais, pour Béatrice Prisca Bationo, alias Serenity Serenity sur les réseaux sociaux, c’est une véritable passion qui l’anime depuis son enfance. Autodidacte, elle a appris les rudiments du tricotage auprès de femmes artisanes à Koudougou, sa ville natale. Aujourd’hui, elle est devenue une professionnelle reconnue pour ses créations originales et variées. Portrait d’une femme qui a su transformer sa passion en métier.
Prisca n’a pas eu une enfance ordinaire. Elle ne jouait pas avec les autres enfants, ni à l’école ni dans son quartier. Elle préférait plutôt, la compagnie des adultes, surtout celles qui pratiquaient des métiers d’art comme la broderie, le crochet ou le tissage. C’est ainsi qu’elle a découvert le tissage avec les chaises, une technique qui consiste à utiliser du fil ou de la mèche pour créer des motifs. Elle a aussi appris à tricoter avec des brins de balai, faute d’avoir de vraies aiguilles. “J’utilisais des brins de balai et je montais mes premières mailles. Ensuite, nous avons déménagé à Bobo”, raconte-t-elle.
Un parcours semé d’embûches
En 1998, elle entre au collège sainte Marie de Tounouma où il y avait la couture comme matière au programme. Une discipline dans laquelle, elle excelle. Elle se révèle très douée pour cette discipline, mais son père s’y oppose fermement. “C’était difficile. Mon père ne voulait pas vraiment entendre parler de métier. Couture, commerce, coiffure, pas de série C dans sa cour !”, se souvient-elle. Prisca doit alors arrêter ses études, mais elle ne renonce pas à sa vocation. Elle continue à coudre en cachette, jusqu’à quitter la maison familiale pour vivre de son art. “Je n’ai pas lâché, j’ai tenu bon”, affirme-t-elle.
Une réussite éclatante
Au début des années 2000, Prisca n’a pas beaucoup de moyens pour exercer son activité de tricoteuse. Elle n’a pas accès à internet ni à des catalogues qui pourraient lui inspirer des modèles. Elle est aussi très timide et introvertie, ce qui ne facilite pas sa communication avec les clients potentiels. Elle se demande alors si ses créations vont plaire aux gens ou non. “Je venais pour révolutionner la chose. J’ai envoyé des modèles de robes fillettes, faites à base de pagne ou de tissu en laine. C’était vraiment original pour certains”, explique-t-elle.
A sa grande surprise, ses modèles rencontrent un franc succès. “Beaucoup voulaient savoir qui je suis. Sauf que je ne voulais pas. Je n’étais pas du tout accessible à l’époque”, confie-t-elle.
Pour éviter le contact direct avec le public, elle préfère vendre ses produits à l’étranger, notamment au Mali où elle trouve une clientèle fidèle et généreuse. “C’était plus simple pour moi que de vendre dans mon propre pays parce que j’étais vraiment comme un poussin dans sa coquille”, dit-elle.
Prisca Bationo est un exemple de persévérance et de créativité
Avec le temps et l’évolution des technologies, Prisca parvient à se faire connaître sur les réseaux sociaux et à échanger avec d’autres tricoteuses du monde entier, notamment de Russie et d’Ukraine. Elle peut ainsi diversifier sa production et proposer des modèles adaptés aux goûts et aux besoins de chacun.
Elle gagne aussi en confiance en soi et en estime de soi. « Même jusqu’à 100 ans, si j’ai la possibilité de voir et de tricoter, je le ferai. C’est ma passion, c’est ma vie », déclare-t-elle avec enthousiasme.
Prisca Bationo est un exemple de persévérance et de créativité. Elle a su surmonter les obstacles et les préjugés pour vivre de son art. Elle a aussi su s’adapter aux évolutions technologiques et aux tendances du marché pour proposer des produits de qualité et originaux.
Elle est aujourd’hui, une référence dans le domaine du tricotage au Burkina Faso et ailleurs. Elle inspire de nombreuses femmes qui veulent se lancer dans ce métier ou qui veulent simplement apprendre à tricoter pour le plaisir. Prisca Bationo, l’artiste du tricot, n’a pas fini de nous étonner avec ses créations.
Françoise Tougry
Fabrice Sandwidi stagiaire