Une start-up et des médecins experts ont mis au point le premier test salivaire pour diagnostiquer l’endométriose, alors que l’errance diagnostique pour cette maladie dure en moyenne huit ans.
Un test salivaire a été mis au point pour diagnostiquer cette maladie qui toucherait une femme sur dix en âge de procréer en France.
« L’endométriose n’est pas un problème de femme, mais de société », prévient François Golfier, chef de service en gynécologie au CHU de Lyon et président de la commission endométriose du Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNGOF). Un mois après l’annonce par Emmanuel Macron de la stratégie nationale de lutte contre l’endométriose, les entrepreneurs et médecins à l’origine de cette découverte dévoilaient à la presse le mode d’emploi et les conséquences de ce nouveau test.
Réduire de huit ans en moyenne à quelques jours le délai de diagnostic
A la manœuvre, Ziwig, une start-up lyonnaise qui a mis au point, grâce à un partenariat public-privé, cet « Endotest ». Qui permettra de dire à toutes les jeunes femmes si elles souffrent d’endométriose. Car cette maladie est à la fois très répandue et difficile à diagnostiquer. Les symptômes, plus ou moins intenses, peuvent passer inaperçus. La maladie se manifeste généralement par des douleurs pendant les règles. Mais également par des douleurs lors des rapports sexuels (30 à 70 %), des troubles digestifs (35 %), une fatigue intense (15 %) et une infertilité (30 à 40 %).
Cet « Endotest » permettrait donc de réduire la durée de diagnostic moyenne de huit ans… à quelques jours. « Aujourd’hui, les patientes vivent un enfer avec des médecins qui ne les écoutent pas toujours, reconnaît Philippe Descamps, gynécologue au CHU d’Angers et vice-président de la Fédération Internationale de Gynécologie et d’Obstétrique (FIGO). « On nous prend souvent pour des folles, on perd du temps et de l’argent », confirme Imany, qui « en bonne élève », a dû attendre exactement huit ans à souffrir sans réponse avant d’obtenir un diagnostic.
Par ailleurs les examens peuvent être lourds et demander beaucoup d’attente : échographie, IRM, cœlioscopie… Et les conséquences de la maladie dramatiques : en moyenne ces patientes sont arrêtées 33 jours par an et le coût sociétal global de la maladie est estimé à 10,6 milliards d’euros en France. « Pendant ces années d’errance diagnostique, les douleurs peuvent évoluer », reprend le gynécologue. « Plus on prend en charge la maladie tôt, moins elle sera invalidante », confirme Pricilla Saracco, patiente experte et membre d’EndoMind.
Un simple crachat peut vous dire si vous êtes atteinte d’endométriose
Comment se déroule ce test ? C’est très simple et non invasif : on reçoit chez soi la boîte contenant un petit tube, dans lequel il suffit de cracher, qu’il faut refermer et envoyer dans l’enveloppe conçue à cet effet au laboratoire. Qui doit vous envoyer le résultat du test en dix jours maximum. La femme pourra donc faire cet autoprélèvement n’importe où, sans avoir à conserver l’échantillon au frigo ni se déplacer au laboratoire. « Quand on a rencontré autant de femmes qui souffrent que moi, c’est un petit miracle en kit !, se réjouit Imany. On va pouvoir améliorer la vie des femmes. »
Mais ce test n’est pas encore disponible en pharmacie. En effet, Ziwig travaille avec les autorités de santé, notamment la Haute Autorité de Santé (HAS) pour tenter de le faire rembourser. Le prix est donc encore en négociation et le test, qui a obtenu le label européen CE, n’est pas commercialisé. « On est prêt sur le plan logistique à produire, promet Gilles Doumer, vice-président de Ziwig. On a prévu des réunions avec la HAS, mais le parcours du remboursement en France est long. »
Une fiabilité de 96 %
Comment les chercheurs ont réussi à mettre au point ce test ? Un essai clinique a été lancé en janvier 2021, associant médecins experts de cette pathologie et ingénieurs de Ziwig. Grâce à un séquençage haut début et à l’intelligence artificielle, l’équipe a déterminé les 109 biomarqueurs impliqués dans l’endométriose chez 153 patientes atteintes d’endométriose.
« Ce test permettra d’identifier 96 % des patientes atteintes d’endométriose, quelle que soit sa gravité », assure François Golfier, gynécologue. « On a travaillé sur le sang et la salive, raconte Gilles Doumer, vice-président de Ziwig. La grande découverte, c’est que la salive a une qualité d’information et une fiabilité équivalentes au sang. »
Et ce n’est que le début de l’aventure. Car cette découverte continue de faire l’objet d’essais cliniques. « Au-delà du diagnostic, cette photo haute définition de la pathologie pourrait renseigner à l’avenir sur le stade de la maladie, sur le risque d’infertilité… », dévoile Yahya El Mir, fondateur de Ziwig. D’ailleurs, une nouvelle étude incluant 1.000 patientes, notamment souffrant d’infertilité, a déjà été lancée. Autant d’informations enthousiasmantes et précieuses pour le premier comité de pilotage interministériel sur l’endométriose, réuni par Olivier Véran qui se tient justement lundi prochain.
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