Femme à plusieurs casquettes, Elise Ilboudo/Thiombiano allie tant bien que mal ses fonctions de Professeur d’histoire et archéologie, de femme politique et de 4ème vice-présidente de l’assemblée nationale. Engagée pour la cause de la femme, elle use de plusieurs astuces pour faire valoir les droits de l’autre moitié du ciel. Rencontre avec une femme d’influence !
Qu’est-ce qui vous a motivé à vous engager dans la politique ?
Plusieurs raisons m’ont motivé à m’engager dans le domaine politique. La première raison est que j’évoluais dans un groupe où il n’y avait que des politiques dont le Larlé Naaba. Sur la scène politique, deux hommes avaient retenu mon attention. Il s’agit du regretté Salif Diallo et de Simon Compaoré. C’est tout naturellement que j’ai basculé dans le Mouvement du Peuple pour le Progrès lorsqu’il a été créé. Je m’y suis retrouvé parce que c’était des gens qui représentaient une vision pour moi, une dynamique dans laquelle je pouvais m’insérer. Une autre raison, c’est que la politique était l’une des voies pour pouvoir se faire entendre, faire entendre la voix des femmes mais aussi la voix de tous ceux qui sont en quête de justice, de liberté, de démocratie, etc.
En février 2019, vous avez piloté l’organisation du forum sur l’autonomisation et la responsabilisation des femmes, pensez-vous que cette activité a fait tache d’huile ? Quel en a été l’impact ?
L’activité a mobilisé plus de 10.000 personnes de tous bords confondus. J’ai été satisfaite de piloter ce comité d’organisation qui a très bien réussi à mon sens. Cela a fait tache d’huile parce que jusqu’à l’extérieur les gens en parlaient. Les panels ont beaucoup intéressé les femmes et ont contribué à leurs éveils. Ceci a donné plus de confiance aux femmes ; les hommes ont alors compris que nous sommes là et que désormais il faudra compter avec nous. Dans les conclusions de ce forum, nous avons demandé que sur le plan politique on ait un poste par province pour les femmes. Ça n’a pas donné parce qu’après le dialogue politique, c’est autre chose qui a été retenu. Mais nous restons toujours dans la dynamique pour voir comment nous pouvons faire en sorte que les femmes puissent mieux être représentées au niveau provincial à l’assemblée nationale.
Vous êtes membre du bureau exécutif du parti au pouvoir, comment œuvrer vous pour faire prendre en compte les droits des femmes?
Avec les femmes du parti, nous faisons des plaidoyers. Nous essayons de voir au niveau du gouvernement ce qui peut être fait pour les femmes. Nous travaillons aussi à l’autonomisation financière des femmes en leur facilitant l’accès aux crédits. Sur le plan politique et administratif, nous attirons l’attention pour qu’on puisse confier plus de responsabilité aux femmes.
Le Burkina Faso fait face à une situation sécuritaire alarmante. Quelle peut être selon vous, la contribution de la femme burkinabè dans la lutte contre le terrorisme ?
Aujourd’hui nous avons des filles qui peuvent s’engager pour être des militaires et pour faire partie de ces volontaires de la défense de la nation. On peut surtout rentrer dans le cadre de renseignement parce qu’on trouve les femmes un peu partout. Où que nous soyons, nous devons également contribuer à localiser ces personnes, à les dénoncer, à trouver des chemins pour faciliter la tâche aux forces de défense et de sécurité. Nous devons en tant que femmes contribuer à enrayer ce fléau par notre participation. Au niveau des forces de défense et de sécurité, il y a déjà des femmes sur le terrain qui apportent leur contribution mais nous qui sommes à la maison, au service, en brousse nous devons ouvrir l’œil et le bon pour apporter notre contribution afin de maîtriser ce phénomène.
Quel regard portez-vous sur la célébration du 8 mars 2020 ?
On a dédié une journée à la femme pour mener des réflexions parce qu’on s’est rendu compte que c’est elle qui travaille le plus mais lorsqu’il s’agit de la responsabiliser, elle est toujours en arrière-plan. Son autonomie est quand même quelque chose d’essentiel pour tenir la famille. Quel que soit ce que la femme a, tout revient à la famille. Je voudrais demander au gouvernement de faciliter l’autonomisation de la femme afin qu’on puisse ensemble booster le développement de notre pays. C’est un regard que je dirige également vers toutes ces femmes déplacées. Je demande pour elles qu’on célèbre autrement le 8 Mars en leur apportant notre soutien, notre compassion et surtout en ayant en présence que ces femmes-là sont aussi des burkinabè.
Comment préparez-vous les élections à venir ?
Nous avons un congrès qui va se dérouler bientôt et qui pourra nous donner toute la légitimité de désigner notre candidat pour 2020. Aujourd’hui nous sonnons la mobilisation de tous les militants de notre parti afin d’avoir une victoire éclatante. Nous nous préparons sérieusement pour qu’il n’y ait pas d’ombre comme cela a été fait en 2015. Nous prions que notre pays retrouve sa sérénité pour que les élections se déroulent bien parce que c’est difficile de lier élections et insécurité.
Quelle appréciation faites-vous du vote de la loi portant fixation de quota et modalités de positionnement des candidates ou des candidats aux élections législatives et municipales ?
Pour ce qui est de la loi quota genre, nous avons beaucoup travailler, au niveau de l’assemblée. Les femmes se sont battues comme elles le pouvaient. Nous avons mené pas mal de plaidoyers au niveau du gouvernement, auprès des responsables des partis politiques. C’est le quota qui a été retenu par le dialogue politique que nous avons voté comme loi. Nous, en tant que membre de parti politique, nous ne pouvons qu’adhérer. Nous adhérons et nous espérons que les fois prochaines on aura mieux que ce que nous avons eu. Je crois que c’est petit à petit que nous allons obtenir ce que nous souhaitons pour les femmes. Nous attendons fin novembre et décembre pour faire le bilan de ce que le quota nous aura donné. S’il y a quelque chose à revoir, nous continuerons à faire le plaidoyer pour améliorer le contenu de cette loi.
Comment arrivez-vous à concilier vous différentes fonctions ?
Au début ça n’a pas été facile pour moi d’allier ma fonction de responsable nationale des femmes du parti, mes cours, ma fonction de député mais après 6 mois j’ai essayé de retrouver l’équilibre. Mon regret c’est que je n’arrive pas à trouver le temps pour faire le terrain alors que pour un archéologue, le terrain est nécessaire. Au cours d’un certain moment j’étais axé sur mes enseignements, sur l’encadrement des étudiants pour leur mémoire, ce qui fait que j’ai un peu lâché le pied au niveau de mes fouilles archéologiques. Je vais essayer de trouver un temps dans mon programme et faire en sorte que chaque année je puisse aller sur le terrain. Nous avons des vacances au niveau de l’assemblée donc je pourrai bien mettre cela à profit.
Marie SORGHO
Faridah DICKO