Elle circule de main en main, tel un calumet de la paix, dans une ambiance fraternelle et orientale… La chicha séduit massivement les adolescents, plus que la cigarette, à l’image négative : 53 % l’ont déjà expérimentée à 16 ans , 70% à 18 ans…
La chicha, assimilée à tort au cannabis
La chicha fait peur aux parents, qui l’assimilent, à tort, au cannabis. Le « tabamel » est un mélange de tabac et de mélasse, qui se fume à l’aide d’une pipe à eau, également baptisée chicha ou narguilé. Il ne s’agit pas d’une drogue illicite, mais d’un dérivé du tabac, un produit moins inoffensif qu’il en a l’air, puisque sa fumée contient de la nicotine, des goudrons, du monoxyde de carbone et des métaux lourds.
« C’est une porte d’entrée dans le tabagisme, met en garde Valérie Chanfreau Munoz, psychologue et addictologue à l’Office français de prévention du tabagisme (OFT). Pour appâter les plus jeunes, les fabricants de « tabamel » l’aromatisent de parfums qui fleurent bon l’enfance : noix de coco, réglisse, cacao… Rares sont ceux qui mentionnent sur leurs paquets la présence de goudrons et de nicotine ! » « Contrairement à la cigarette, la chicha est une pratique conviviale, explique la spécialiste, qui fait de la prévention auprès des lycéens.
Les dangers mal connus du narguilé
Ses consommateurs ne recherchent pas tant la transgression que le plaisir de se retrouver entre copains. Ils ignorent tout de la toxicité du produit et des risques encourus : dépendance, cancer des voies respiratoires, maladies cardio-vasculaires. La fumée de la chicha est en partie filtrée par l’eau, mais comme elle irrite moins la gorge, ils en aspirent davantage : une bouffée revient à fumer une cigarette, et une session complète, deux paquets !
Sans oublier une éventuelle transmission de virus – hépatite, herpès –, si le même embout circule de bouche en bouche. » Pour prévenir ces dangers, il importe que les parents délivrent un message clair à leur enfant : pas de chicha à la maison, encore moins avant 16 ans.
Avec un adolescent plus âgé, l’interdiction risque d’avoir l’effet inverse. Mieux vaut amorcer le dialogue sans dramatiser, et l’inciter à réduire sa consommation, en soulignant quelques effets secondaires, plus fâcheux à cet âge qu’un hypothétique cancer du poumon : haleine fétide, cheveux ternes, baisse des performances sportives et sexuelles. Ils évoqueront aussi sa responsabilité vis-à-vis des amis non fumeurs, et insisteront pour finir sur sa liberté, à savoir sa capacité à résister à une pratique addictive et aux manipulations des industriels du tabac. Un argument de nature à les ébranler.